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Baux Commerciaux La lettre du mois de juin 2016

Jehan-Denis BARBIER
Docteur en droit
Avocat à la Cour

Par un arrêt du 26 mai 2016 (pourvois n°  15-10.894 et 15-12.267), la Cour de cassation a jugé que le bail prévoyant que les loyers et charges impayés produiraient des intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois, les juges ne peuvent pas réduire cette clause pénale à 0,5 % par mois sans caractériser la disproportion manifeste entre le préjudice réellement subi par la société propriétaire et le montant de la peine conventionnellement fixé. 

 A la suite d’un désaccord sur la charge de divers travaux de mise aux normes, la société locataire avait suspendu le paiement de certains loyers et charges, ou les avait, semble-t-il, séquestrés sur le compte Carpa de son avocat. Cette méthode est extrêmement dangereuse pour le locataire et est à déconseiller, car la séquestration des loyers, sans autorisation du juge, n’a strictement aucune valeur et ne vaut pas paiement. Que le locataire mette les loyers dus sur un compte Carpa ou qu’il les garde sur son compte personnel revient exactement au même.
 
La société propriétaire avait fait signifier à son locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail.
 
A la suite de diverses procédures, la clause résolutoire fut déclarée acquise, la société locataire devant donc être expulsée et étant condamnée au paiement d’un solde de loyers et charges.
 
Le litige soumis à la Cour de cassation portait seulement sur le taux de l’intérêt dû par la société locataire sur les arriérés de loyers et charges. Le bail prévoyait un taux conventionnel de 1,5 %.

 Or, les juges du fond, estimant sans doute que la sanction de la résiliation du bail était déjà une sanction sévère, réduisirent le taux de l’intérêt à 0,5 % par mois, au lieu des 1,5 % prévus au bail.
 
La clause pénale est actuellement régie par l’article 1152 du Code civil :
 
« Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite. ».
 
On notera que ce texte a été maintenu de façon pratiquement inchangée dans les nouvelles dispositions du Code civil, qui entreront en vigueur le 1er octobre 2016, à la suite de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
 
Le nouvel article 1231-5 du Code civil dispose :
 
« Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure. ».
 
Cependant, pour réduire une clause pénale, les juges doivent expliquer en quoi elle est manifestement excessive [1].
 
En l’espèce, la Cour de cassation casse la décision des juges du fond au motif qu’ils n’ont pas caractérisé la disproportion manifeste entre le préjudice réellement subi par la société locataire et le montant de la peine conventionnellement fixée, c’est-à-dire le taux de 1,5 % par mois de retard.
 
Effectivement, la disproportion manifeste visée par le texte doit s’apprécier en comparant le montant de la pénalité contractuelle à celui du préjudice effectivement subi [2].
 
Pour apprécier le caractère excessif d’une clause pénale, le juge doit se placer à la date de sa décision [3].
 
 Les juges doivent donc vérifier le préjudice réellement subi par la société propriétaire, en raison du retard ou de l’absence de paiement des loyers et charges, pour apprécier ensuite si la pénalité contractuelle de 1,5 % par mois de retard est manifestement excessive ou non.
 
Le pouvoir des juges du fond reste d’ailleurs entier, puisqu’ils sont souverains dans l’appréciation du préjudice subi. Ils doivent seulement permettre à la Cour de cassation d’apprécier le rapport entre la pénalité et ce préjudice ainsi souverainement défini par eux.
 
En l’occurrence, un intérêt conventionnel de 1,5 % par mois de retard n’a pas été considéré comme manifestement excessif par lui-même. Il appartiendra à la cour d’appel de renvoi, soit de maintenir ce taux d’intérêt contractuel, soit de dire que le préjudice réellement subi est manifestement plus faible, pour réduire éventuellement le montant de la pénalité.
 

[1] Cass. ch. mixte 20 janvier 1978, D. 1978 inf. rap. 229.
[2] Cass. com. 11 février 1997, Bull. cass. 1997 IV, n° 47.
[3] Cass. 1ère civ. 19 mars 1980, Bull. cass. 1980 I, n° 95.

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