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Baux Commerciaux Sur les intérêts dus par le bailleur après fixation de l’indemnité d’éviction

SUR LES INTERÊTS DUS PAR LE BAILLEUR APRÈS FIXATION DE L'INDEMNITÉ D'ÉVICTION

COUR DE CASSATION (3ème Ch. civ.), 4 juillet 2001, Cts Djian c/ Planke, Pourvoi en cassation c/ un arrêt de la Cour d’appel de Paris (16ème Ch. A) en date du 2 juillet 1997.

Selon l’article 1153-1 du Code civil, la Cour peut fixer le point de départ des intérêts au taux légal à compter de la date du prononcé de l’arrêt fixant le montant de l’indemnité d’éviction. Ayant relevé à bon droit que l’indemnité d’éviction n’emporte pas intérêts au taux légal au profit du preneur évincé durant le laps de temps où cette indemnité reste légitimement entre les mains du séquestre et constaté que le preneur avait quitté les lieux le 1er octobre 1990 et qu’il avait dû introduire deux procédures de référé pour percevoir l’essentiel de son indemnité d’éviction, la Cour d’appel, retenant que les bailleurs devaient assumer les conséquences du mauvais vouloir de leur auteur à se libérer de la somme qu’il devait au preneur évincé, a pu en déduire qu’ils devraient verser les intérêts au taux légal sur le montant de l’indemnité d’éviction entre la date du départ des lieux du locataire et la date à laquelle le séquestre en exécution des ordonnances de référé, s’était dessaisi de cette indemnité.
Sur les intérêts dus par le bailleur après fixation de l’indemnité d’éviction
Note :
Il paraît admis depuis longtemps qu’en cas de délaissement des lieux par le preneur postérieurement à la date d’échéance du bail par l’effet du refus de renouvellement, le cas échéant en cours d’instance, le préjudice subi doit être évalué à la date de la restitution des clefs et le preneur est alors fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal dus à compter de la restitution des locaux (Cass. civ. 17 mars 1981, Gaz. Pal. 1981.2. som. p. 181; Cass. civ. 30 janvier 1985, JCP, éd. G, 1985, IV, p. 136).
Lorsque l’indemnité d’éviction intervient sans que le preneur n’ait renoncé au bénéfice du droit au maintien dans les lieux, la question se présente dans des conditions différentes, et ce essentiellement pour deux motifs :


  • d’une part, même si le fait générateur découle du refus de renouvellement opposé par le bailleur, il n’en demeure pas moins que l’indemnité d’éviction a pour objet d’indemniser le préjudice découlant de la restitution ultérieure des locaux par le preneur évincé, puis de l’acquisition d’un autre fonds ou du transfert de ses activités,

  • d’autre part, l’article L 145-30 du Code de commerce prévoit qu’à défaut d’exercice du droit de repentir “... l’indemnité d’éviction devra être versée au locataire ou, éventuellement, à un séquestre dans un délai de trois mois à compter de la date d’un commandement fait par acte extrajudiciaire ....”.

On peut dès lors s’interroger sur les modalités d’application de l’article 1153-1 du Code civil dans cette hypothèse et en particulier sur la faculté pour le Juge comme pour la Cour d’appel de prévoir le point de départ des intérêts au taux légal dus par le bailleur dans des conditions étrangères à la procédure spécifique prévue à cet effet par les dispositions statutaires.
Cependant, à plusieurs reprises déjà, la Cour de cassation s’est prononcée en faveur de l’application de l’article 1153-1 du Code civil, en rejetant les pourvois dont elle était saisie, permettant ainsi la fixation discrétionnaire du point de départ des intérêts par la Juridiction saisie (Cass. civ. 15 juin 1994, AJPI 1995, p. 32, note B. Boussageon; Cass. civ. 4 octobre 1995, Rev. Administrer, mai 1993, p. 30, note B. Boccara-D. Lipman-Boccara et ML Sainturat).
Auparavant sur le fondement de l’article 1153 du Code civil, il avait été retenu que le droit au maintien dans les lieux reconnu aux locataires jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction, ne fait pas obstacle à l’application des dispositions concernant l’octroi des intérêts légaux (Cass. civ. 16 mars 1988, Bull. loyers 1988, n° 282), étant observé que le litige portait sur les intérêts dus à titre tant moratoire que compensatoire pour la période comprise entre la date du commandement de payer et la date du règlement effectif, démarche qui s’inscrivait donc dans le contexte de l’ancien article 20 du décret.
Mais après avoir rappelé le principe découlant de l’application de l’article 1153-1 du Code civil, la Cour de cassation a dû examiner le bien fondé de la décision rendue au regard des conditions particulières découlant de la consignation de l’indemnité d’éviction entre les mains d’un séquestre selon la procédure prévue à cet effet par l’article L 145-29 du Code de commerce, la Cour d’appel ayant sanctionné en réalité le versement tardif de l’indemnité consignée au preneur qui avait délaissé entre-temps les lieux loués....
Ce sont donc des considérations spécifiques à cette espèce découlant de l’obstruction imputable au bailleur ou à la succession de ce dernier qui sont à l’origine de la condamnation prononcée par la Cour, les intérêts étant dus à compter de la remise des clefs par le preneur jusqu’au jour du paiement global de l’indemnité ...
Selon cette jurisprudence qui fait abstraction des dispositions spécifiques aux baux commerciaux pour retenir l’application du droit commun, les intérêts au taux légal pourraient être dus à compter du prononcé du jugement ou de l’arrêt de la Cour jusqu’à la remise des fonds au séquestre, puis à nouveau si du fait du bailleur, le preneur ne pouvait percevoir dans des délais normaux le versement des fonds qui lui sont dus.

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